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Affichage des articles du décembre, 2007

savoureux plutôt que goûtu

L'adjectif savoureux est en voie d'extinction dans les médias audiovisuels et la publicité, au bénéfice de goûtu . Inventé il y a une vingtaine d'années dans le registre drôlatique et familier, l'adjectif goûtu n'a pas sa place dans un commentaire gastronomique châtié. Mais de nombreux professionnels de la langue perdent de vue les notions de registre ou de niveau de langue, et emploient un terme comme goûtu sans aucune conscience de sa trivialité ni de la connotation humoristique qui s'y attache. Est goûtu ce qui a un goût prononcé, éventuellement très déplaisant (comme la désopilante liqueur d'échalote au crapaud de la comédie Les Bronzès font du ski , dans les dialogues de laquelle ce mot fait surface). Est savoureux ce qui a une saveur agréable, voire succulente, ce qui a bon goût , voire très bon goût . Quant à " goûteux " (sic), que l'on trouve parfois aussi dans les médias à la place de savoureux , c'est un terme total

très très et tsoin-tsoin

On note dans les médias parlés une tendance nette et récente à redoubler l'adverbe très . " Nous vous souhaitons une très très bonne année " (France 2). " Le matin, il fera très très froid en région parisienne " (France 3, à propos d'une météo prévoyant tout juste un degré au-dessus de zéro, ce qui n'est pas sibérien). " Une exposition très très intéressante " (France Inter). " Concerts très très privés " (RTL). Bien entendu, ce tic de langage fait tache d'huile dans le public. Et c'est le français qui dérape. Au dix-huitième siècle encore, très était une sorte de préfixe attaché à l'adjectif par un tiret : " Notre très-généreux souverain ". Peut-être au vingt et unième siècle faudra-t-il revenir à l'usage du tiret pour lier le redoublement de très auquel les orateurs publics sont en train de nous accoutumer ? Nous écrirons alors très-très ; comme tsoin-tsoin . Mais nous pouvons aussi renoncer à

très c'est déjà beaucoup

La tendance emphatique à redoubler, voire tripler, l'adverbe très n'est toujours pas en régression mais s'installe au contraire depuis une bonne demi-douzaine d'années dans le français médiatique. " Nous vous souhaitons une très très bonne année " (France 2). " Le matin, il fera très très froid en région parisienne " (France 3, à propos d'une météo prévoyant tout juste un degré au-dessus de zéro, ce qui n'est pas sibérien). " Une exposition très très intéressante " (France Inter). " Concerts très très privés " (RTL). Bien entendu, ce tic de langage fait tache d'huile dans le public. Et c'est le français qui dérape. Et surtout, qui s'appauvrit. Car le redoublement de très très , toujours suivi d'une adjectif relativement pauvre ( froid, bon, intéressant , etc) sert aussi à se dispenser de puiser dans le vocabulaire foisonnant de la langue française un terme qui exprime avec justesse la très-très-tude

le gavage et la gravure

Certains graveurs industriels font preuve de beaucoup d'attachement à l'emploi du mot " gravage " (de DVD, de vitrages, etc). L'action de graver s'appelle pourtant la gravure . Le gravage se trompe de suffixe. La langue française a choisi d'unifier ses beaux-arts par une même désinence : gravure, peinture, sculpture, architecture, et non gravage, peintage, sculptage et architectage. Les graveurs artisanaux ou industriels qui emploient cependant "gravage" donnent à cela une explication embarrassée : gravure ça fait trop artiste, gravage ça fait plus technique. Cette crainte n'est pas fondée. D'une part la désinence en - ure est fréquente dans les termes techniques (soudure, bouture, reliure, ferrure, dorure, etc). D'autre part, ni les entreprises de peinture de fuselage des avions ni celles de peinture en bâtiment n'ont éprouvé le besoin de créer le mot peintage pour faire plus technique. Et la célèbre marque au Bibend

le cdt n'est pas cordial

En français les trois lettres Cdt sont l'abréviation du mot Commandant . Ou, tout en capitales (CDT), le sigle des comités départementaux du tourisme. Il existe pourtant des correspondants par voie de courriels, nullement titulaires du grade de commandant, qui vous terminent leurs messages par les trois lettres "Cdt". En réalité, ils ignorent les usages protocolaires de base et entendent par là vous saluer cordialement . Mais ils pourraient aussi bien vous tirer la langue ou vous faire un bras d'honneur. Car si l'on n'est pas cordial au point de prendre la peine d'écrire en toutes lettres une formule de politesse déjà concise à l'extrême, alors on ne l'est pas du tout. POUR ACCÉDER A LA PAGE D'ACCUEIL DU SITE, CLIQUEZ ICI