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toujours très très

La tendance emphatique à redoubler, voire tripler, l'adverbe très n'est toujours pas en régression mais s'installe au contraire depuis maintenant quatre ans dans le français médiatique.
"Nous vous souhaitons une très très bonne année" (France 2). "Le matin, il fera très très froid en région parisienne" (France 3, à propos d'une météo prévoyant tout juste un degré au-dessus de zéro, ce qui n'est pas sibérien). "Une exposition très très intéressante" (France Inter). "Concerts très très privés" (RTL).
Bien entendu, ce tic de langage fait tache d'huile dans le public. Et c'est le français qui dérape.
Et surtout, qui s'appauvrit. Car le redoublement de très très, toujours suivi d'une adjectif relativement pauvre (froid, bon, intéressant, etc) sert aussi à se dispenser de puiser dans le vocabulaire foisonnant de la langue française un terme qui exprime avec justesse la très-très-tude, sans le secours de cette double dose d'adverbe.
Au dix-huitième siècle encore, très était une sorte de préfixe attaché à l'adjectif par un tiret : "Notre très-généreux souverain". Peut-être au vingt et unième siècle, faudra-t-il revenir à l'usage du tiret pour lier le redoublement de très auquel les orateurs publics sont en train de nous accoutumer ? Nous écrirons alors très-très, comme tsoin-tsoin.
Mais nous pouvons aussi renoncer à minorer la valeur de l'adverbe très, et nous souvenir que très fort, c'est déjà très fort.

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